samedi 24 janvier 2015

22) Chapeau Patrice ! (2021)




Pointe de la Torche, Finistère, France, avril 1986.

La houle est énorme en ce samedi béni par les dieux du windsurf. Le vent, qui souffle aux environs de 30 noeuds, est orienté au sud, soit side shore bâbord dans l'anse de Pors-Carn. C'est là que les organisateurs de la World Cup ont réussi à mouiller un parcours de type "ins and outs", qui consiste à effectuer des allers-retours entre une bouée ancrée au large et une seconde placée dans les rouleaux du bord de plage.


C'est tellement carton que certains coureurs, effrayés, refusent de prendre part à leur manche en prétextant un problème de matériel. D'autres se font laminer d'entrée de jeu par le shorebreak, et l'on verra même l'expérimenté Peter Cabrinha faire demi-tour en pleine course devant une vague menaçante de plus de 6 mètres de haut !


Patrice Belbeoch, le régional de l'étape, est aux anges. Il devait partir travailler sur un ferry comme le souhaitait son père mais il a tout plaqué au dernier moment afin de pouvoir participer à cette épreuve du World Tour. Il connait le spot comme sa poche, et son gabarit de grand costaud l'avantage dans ces conditions plus que solides. Il progresse donc tranquillement dans le tableau, et en quart de finale, il réalise un exploit qui va lancer définitivement sa toute jeune carrière. Il devance un Robby Naish médusé et termine premier devant des centaines de supporteurs finistériens massés sur la pointe...


Plage du Goulien, Presqu'île de crozon, Finistère, avril 1998, France, 11 h 28.


J'observe le spot en compagnie de Raphaël Puglisi depuis le haut de la falaise qui domine le spot. Nous sommes partis la veille de Normandie pour un surftrip de quelques jours, et ce bien que les conditions de vent ne soient pas des plus favorables. Celui-ci est orienté au sud-ouest, et souffle à un bon force 5. Comme il doit faiblir dans l'après-midi, nous décidons d'attendre avant de nous mettre à l'eau et pour ce faire, quoi de plus agréable que d'observer les planchistes locaux, surtout s'il sont talentueux !


C'est bien sûr le cas de Patrice Belbeoch, désormais surnommé le Belbe, lequel marche vers l'Océan d'un pas déterminé. Il porte à bout de bras un prototype Exocet de vague shapé par Jean-Marie Guirrec, et une voile Neil Pryde NR (pour Nils Rosenblad, du nom du designer de la marque à cette époque) dont j'estime la surface à 5.4 m² ou 5.8 m². Les vagues font environ 1 m 50, et après deux bords pour se régler et se chauffer, le festival du breton commence.


Au diable les late front loops pourtant à la mode, et tournés au ralenti après être resté en position de high jump le plus longtemps possible : Patrice envoie une terrible rotation dès qu'il le peut et tourne ses forwards à la vitesse de l'éclair ! A l'heure où j'écris ces lignes (nous sommes en 2010), je n'ai toujours pas vu un autre rideur exécuter cette manoeuvre avec autant de rapidité. Ces réceptions sont fracassantes mais heureusement pour lui, les ''exo'' sont solides ! Lors de ses backloops, la hauteur atteinte est vraiment impressionnante, avec qui plus est des amerrissages quasi-parfaits sur le nose. Il ne rechigne pas non plus à l'occasion à effectuer un bon vieux table-top, la carène parfaitement plaquée vers le ciel. Ses surfs sont aussi très fluides et très percutants, avec beaucoup de verticalité, et si vous trouvez que j'exagère, rappelez-vous que Patrice fut le seul français à devenir champion du Monde en Vague sur le Word Tour en 1996 !


Ah, j'oubliais pour les fans de près serré sur du matériel de slalom ou en Formula... L'animal fait un cap de folie comparé au commun des mortels : après une vague down the line à 8 rollers, il se replace en deux bords bien cadrés au vent du spot : chapeau Patrice !

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