samedi 24 janvier 2015

19 ) Seul au monde ! (2021)


Rue des Brisans, la Tranche sur mer, Vendée, France, août 2008, 20 h 27.

Me voici comme tous les ans en Vendée pour quelques semaines de vacances en famille. Nous logeons comme d'habitude dans une maison du quartier du Phare à la Tranche sur mer, et bien sûr, je n'ai pas choisi au hasard ce site hautement stratégique pour les adeptes des sports de glisse...


A ma droite, les plages de sable du Corps de Garde et de la Terrière, lesquelles font face à l'ouest et reçoivent donc les swells qui nous font le plaisir d'arriver sur la Côte Atlantique en été. C'est un très bon endroit pour une session de surf ou de SUP dans des conditions qui peuvent être parfois consistantes.


A ma gauche, le spot de la pointe du Groin du Cou, plus connu sous le nom du Phare, et qui de part son orientation face à l'île de Ré reçoit malheureusement une houle atténuée. Les vagues y déroulent régulièrement en droite sur une dalle rocheuse recouverte à marée haute, et le vent thermique de nord-ouest, très courant en été, y souffle side shore. C'est donc le seul spot de la région à fonctionner pendant certaines journées de la saison estivale mais la brise y est quasi-inévitable. Les kitesurfers ont investi l'endroit depuis longtemps mais lorsque la houle rentre et que le vent souffle fort, nombreux sont les windsurfeurs qui tracent eux aussi des courbes serrées sur des vagues qui peuvent être longues, très longues...

Mon record personnel est de 22 rollers sur une droite attrapée au large sur le reef, à l'ouest du blockaus, et qui m'a emmené jusqu'au poste de secours en bord de plage... Une chevauchée infernale de presque deux minutes et qui m'a laissé les jambes en feu en sortie de vague, comme après une longue descente à skis !


Cela n'arrive malheureusement pas tous les jours, et ce ne sera pas le cas aujourd'hui. Avec Didier Comble, un ami longboarder local adepte du 10 pieds, nous observons la mer du haut de la dune, près du poste de secours de la plage du Corps de Garde . Le vent souffle de l'ouest à force 3, et de jolies petites lignes d'environ 70 centimètres déferlent néanmoins à mi-marée. Les prévisions sont très optimistes pour demain matin, une belle dépression creusant rapidement au large des côtes bretonnes.


Comme nous avons déjà réalisé une bonne petite session sur l'heure de midi, avant que le thermique ne se lève, nous décidons de suivre les bons conseils de Gontran, sauveteur-CRS et figure incontournable du lieu : ''Ce n'est vraiment pas terrible : vous feriez mieux d' aller prendre l'apéro et de vous coucher de bonne heure pour être en forme demain ! ''.
   
Spot de Bud-Bud, Longeville, Vendée, France. Août 2008. 5 h 45

Il fait encore nuit lorsque je m'engage tous feux éteints sur la route qui traverse la forêt de Longeville. Il y a pas mal de rideurs qui dorment dans leurs fourgons et je me gare donc discrètement près de l'entrée du chemin n°16 qui serpente à travers la dune en direction de l'Océan. La mer est haute et même si je n'aperçois pas les séries, le grondement des vagues et l'absence totale de vent me font me décider rapidement : top départ !

Après un enfilage rapide du shorty et un échauffement en bonne et due forme, me voici 5 minutes plus tard ramant vers le large. Je n'y vois pas grand-chose, mais la chance est avec moi car la houle possède une longue période de 12 secondes, et je passe la barre au moment d'une accalmie. Les vagues sont creuses et font un joli mètre cinquante dans les plus belles séries, mais surtout déferlent très régulièrement sur les bancs de sable qui ont fait la réputation de l'endroit. Aux premières lueurs du jour et pendant 20 minutes, je me régale en solo sur de longues droites glassy, et ceci bien que j'ai parfois le soleil dans les yeux.

Quelques shortboardeurs font leur apparition. Quant aux autres rideurs, je les aperçois venir checker les conditions au sommet de la dune puis repartir en courant comme des dératés pour aller chercher leur matériel ! Le spot se rempli donc rapidement et comme je peux démarrer facilement sur n'importe quelle série avec ma Naish Nalu 10'6, je me décale au fur et à mesure vers le sud afin de ne pas gêner les shortboardeurs qui tentent souvent le barrel en bord de plage.


Je suis encore une fois le seul à pratiquer le SUPsurfing sur le spot. J'ai bien croisé dans la région un ou deux Stand Up Paddlesurfer, comme le très doué et très enthousiaste François Cholet équipé d'une Gong Greedy. J'ai partagé avec lui quelques sessions au Phare ou bien sur le spot de repli de Saint-Vincent-sur-Jard, à quelques dizaines de mètres de la maison du Tigre Georges Clémenceau, mais c'est tout !


Depuis que je pratique cette discipline remise au goût du jour par Laird Hamilton et Dave Kalama en 2005, je ne ressens pas d'hostilité de la part des autres glisseurs. Je suscite davantage la curiosité que l'animosité :  avec ma pagaie et ma drôle de grosse planche, je passe souvent pour l'extra-terrestre de service !


Le spot est maintenant bondé, et des grappes de rideurs se disputent les meilleurs pics. Bien qu'ils soient dans leur immense majorité respectueux des priorités, il y a toutefois quelques shortboadeurs qui taxent sans vergogne, démarrant sur des vagues déjà occupées par des rideurs mieux placés qui ont fait l'effort de réussir leur take off sur une bosse de houle. Le spectacle offert n'a rien à voir avec celui qu'offrait le spot dans les années 70, lorsque des Australiens de passage ont trouvé l'endroit sympa, et ont commencé à surfer ''the good peak of la Budienne".


9 h 27. Je suis vidé et j'en ai surtout plein les bras ! Je décide donc de remonter vers le nord et la sortie n°16, en comptant le nombre de surfeurs présents à l'eau tout en shootant ici et là des vagues au gré de ce qui se présente. Cela va me prendre environ 25 minutes et le compteur est dans le rouge lorsque j'empoigne mon SUP et ma pagaie pour sortir de l' eau.


J'ai dénombré 108 rideurs (shortboardeurs, longboardeurs, bodyboardeurs, etc), sans compter ceux qui font une petite pause assis sur le sable  : je dois avouer que l'espace d'un instant, la fatigue aidant, je me suis senti un peu seul...

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